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Notes sur la démocratie

samedi 19 mai 2018, par kilombo

1La démocratie n’est pas une simple question de votes, de majorités, de gouvernements libres ou de décisions collectives ; de la même manière que le Capital n’est pas une simple question de somme d’argent ou un ensemble de machines… tel que l’affirme l’idéologie dominante. Nous qui luttons de toutes nos forces contre la société présente, avons une compréhension historique et sociale très différente du Capital, de la démocratie (ainsi que de bon nombre d’autres « concepts » tel que la « valeur », le « prolétariat », l’ « argent », le « parti », le « mode de production »). En effet, pour nous, la compréhension de tous ces concepts diffère totalement de celle vulgairement utilisée par les médias, les universités ou en général par l’idéologie dominante.

2Il ne s’agit cependant pas d’en faire une question de mots ou de définitions. Il ne s’agit pas de « définir » le Capital, la démocratie ou le prolétariat d’une manière différente, par snobisme ou intellectualisme. Il s’agit, au contraire de mettre en évidence ce que le Capital (la démocratie, le prolétariat…) sont historiquement. Et cela indépendamment de ce qu’en dit l’idéologie dominante, ou plutôt de la manière dont la classe dominante tente de l’occulter. Autrement dit, il ne s’agit pas de donner intellectuellement une définition différente (comme le font les intellectuels quand ils discutent entre eux de questions conceptuelles), mais de mettre en évidence le processus historique réel. Nous tentons d’exprimer, par la voie de la pensée et de la manière la plus claire possible, les processus qui sont vécus dans la pratique. En effet, nous tentons de voir des processus, des énergies, des forces, des directions... là où la logique formelle voit des choses. Pour ce faire, nous insistons sur le fait d’expliquer théoriquement comment le Capital se définit (pour continuer avec cet exemple) dans son processus historique (naissance, développement et mort ; biologie/nécrologie) en tant qu’énergie, en tant que force. Pour ce faire, nous concevons le prolétariat en tant que processus qui va de sa dissolution à son affirmation en tant classe (pour l’abolition des classes), en tant que processus qui rompt avec sa déstructuration individualiste et se constitue comme force historique au travers d’une lutte associative accidentée. De la même manière, nous ne cherchons pas la définition de la démocratie selon les idéologues et universitaires mais bien dans le long processus historique de développement de la marchandise, l’atomisation de la valeur, jusqu’à la dictature généralisée de la valeur se valorisant.

3Par exemple, l’idéologie dominante identifie le Capital à une matière physique en l’assimilant, comme s’il s’agissait de la même chose, à une certaine somme d’argent ou à la machine dont la propriété permet la production (y compris pour les plus marxistes) et la possibilité d’exploiter le travail humain. Pour nous au contraire, le Capital est essentiellement énergie, force, processus. Depuis son origine et au travers de toute son histoire, le Capital est de la valeur en processus de valorisation (développement de la valeur d’échange, de l’équivalent général, autonomisation de la valeur). Avec le temps ce processus s’est affirmé comme le sujet même de la société actuelle dans le sens totalement pratique et concret qui consiste à ce que toutes les décisions sociales sont imposées par son être : maximalisation du taux de profit. C’est justement cette compréhension pratique et historique de notre parti qui permet de capter et agir mieux dans la perspective de la mort du Capital. Elle permet en même temps de mettre en évidence que la compréhension dominante est partielle, intéressée et dérive, à son tour, du fétichisme de la marchandise et plus globalement du matérialisme vulgaire : on ne voit que les « choses » et non les relations sociales qui se cachent derrière les choses. En percevant le Capital pour ce qu’il est réellement, quelles que soient les formes dans lesquelles celui-ci se présente et se cache (somme d’argent, machine, force de travail, marchandise, patron…), son caractère de processus social et historique est mis en évidence et sa nécrologie mise à nu : sa mort apparaît comme nécessaire. Ainsi, la conception du Capital en tant que chose peut être dénoncée pour ce qu’elle est en réalité : une vision partielle et bourgeoise.

4Il en va de même avec la démocratie qu’avec le Capital (et avec tous les autres concepts – voir encadré). Son assimilation à la liberté de choisir, au supposé meilleur mécanisme de décision sociale basé sur la majorité des participants n’est rien de plus qu’une vision bourgeoise et intéressée. De plus cette vision est limitée (non historique), exclusivement politique (elle n’est ni globale, ni sociale) et prend comme présupposé ce qui, en réalité, est le résultat (relativement récent) d’un long processus historique. On prend appui sur le droit des individus et sur les décisions de ces individus comme si ces derniers avaient toujours existé alors qu’en réalité ces individus sont le produit de siècles d’échange marchand et de séparation violente de l’être humain avec sa communauté originelle. On « oublie » ni plus ni moins que cet individu libre et démocrate n’existait pas dans le passé mais qu’il est l’excrément de siècles de terrorisme d’État.

5En effet, la démocratie est l’autre face de l’échange marchand qui est née et s’est développée avec lui. Il est historiquement faux de s’imaginer l’origine de la marchandise dans les individus qui s’échangent. C’est le contraire, les communautés se dissolvent au travers du processus d’échange 1, et c’est ce même processus qui génère historiquement l’individu atomisé. La marchandise, dans son développement historique, détruit la communauté humaine. Et l’argent, en tant qu’unique être commun, se substitue petit à petit à la communauté et finit par occuper sa place. « L’argent en tant que communauté exclut tout autre communauté » 2. La destruction de toute communauté humaine a été de pair avec l’atomisation sociale et l’apparition historique (la production) de l’individu (libre, égal, propriétaire et en tant que tel capable de vendre et acheter), de l’individu propriétaire et de l’individu vendeur de sa force de travail, ainsi qu’avec la conformation de toute la société à un grand marché. Concomitamment avec cette dispersion individuelle marchande, l’unification « humaine » ne peut surgir qu’artificiellement sur base de libres consentements et de fausses communautés ( politiques, culturelles, syndicales, religieuses, raciales, sportives...). C’est cette atomisation fondamentale et l’artifice de l’union sur des bases faussement humaines qui constituent l’essence de la démocratie. La démocratie est à la fois la destruction de l’unité humaine essentielle et la construction de fausses unités pour que « le tout » n’explose pas. Ou mieux dit, la reproduction de l’atomisation jusqu’à l’infini (caractère infinitésimal de l’individu atomisé) et la reproduction caricaturale et absurde de n’importe quel type de communauté fictive en antagonismes permanents (pensons aux sectes religieuses, aux supporters de football, aux groupes musicaux ou culturels, aux fronts populaires, aux nations...)

6Rien de plus logique donc que l’idéologie dominante réduise la démocratie à ses aspects politiques et même électoraux. Il y a une cohérence dans l’apologie selon laquelle en démocratie, tout le monde est libre de décider. En réalité, on occulte ici que la réalité historique et sociale de cette liberté de décider, c’est la séparation historique de l’être humain avec ses moyens de vie (expropriation sans fin parce qu’essentielle au Capital : elle a commencé il y a des siècles et elle continue aujourd’hui avec la plus grande violence et terreur étatique jamais connue dans l’histoire !), on occulte que le véritable sujet de la décision c’est toujours la propriété privée et ses déterminations. Ils nous cachent que la phase actuelle, dans laquelle ces troupeaux de monades « décident » dans une profonde solitude, unifiés par des fictions diverses et toujours renouvelées (par la terreur d’État), constitue en réalité le résultat de la déshumanisation totale de l’être humain (la communauté est la véritable essence de l’être humain). Pour finir, ils nous cachent que ce qui décide en démocratie, ce n’est pas l’être humain mais la dictature de l’économie, la dictature du profit du Capital.

7En abandonnant alors les conceptualisations de la démocratie telle que les démocrates la définissent (un idéal de liberté, d’égalité et de fraternité où les citoyens décident politiquement) et en entrant dans la prosaïque réalité et dans son histoire, la première chose qui saute aux yeux est, comme le disaient les révolutionnaires du 19ème siècle (Marx dans La lutte des classes en France), que depuis l’origine, la réalité de cette liberté, égalité et fraternité... est l’infanterie, la cavalerie et l’artillerie. Ou autrement dit, que ce reflet idéal du marché que constitue la triplette démocratique est un produit historique du développement marchand de la société, dont le fondement historique est l’exploitation de l’homme par l’homme garantie par la terreur d’État. Exploitation et terrorisme d’État sont les véritables fondements de la production et la reproduction élargie de l’individu atomisé et libéré (séparé, exproprié...) de ses moyens de vie. L’idéologie dominante cristallise ces concepts produits par le monde marchand dans l’égalité et la liberté juridique. Mais cette cristallisation est simultanément occultation de ce qui est « imprésentable ». La terreur latente et permanente, qui sépare les êtres humains de ce dont ils ont besoin, apparaît en surface comme conciliation et paix sociale.

8C’est pour cela que les idéologues et les fabricants d’opinion publique font seulement référence à la démocratie en surface de la société, dans la sphère politique, car c’est l’unique manière d’ignorer la réalité de la démocratie en tant que terrorisme social et historique. De même, ils font référence à l’État en tant que garant permanent de la propriété privée et de toutes les égalités et droits dérivés de celle-ci. Tout l’ordre juridico-démocratico-mondial est édifié sur le fondement de la propriété privée et est garanti par l’État. C’est ainsi que dans la sphère idéologique du droit, les concepts d’égalité et de liberté juridique, clés de la démocratie, semblent surgis de la volonté des hommes (comme si l’homme en tant qu’individu de la société bourgeoise avait préexisté) et non comme le résultat de siècles de terrorisme d’État. Ce dernier est le composant essentiel dans la démocratie, celui qui prive et continue à priver les êtres humains de ce dont ils ont besoin pour vivre. Le respect de la propriété privée n’est rien d’autre que le terrorisme d’État socialement consolidé et la clé de la démocratie en tant que mode de vie de l’espèce humaine subsumée dans le Capital.

9Dans la sphère politique de la décision démocratique, on affirme exactement les mêmes fictions que dans le marché parce qu’elles ne sont rien d’autre que son sous-produit ou si l’on veut, son reflet : tous sont égaux et libres de décider tant dans le vote qu’au supermarché. L’opinion et le vote, l’achat et la vente ne sont rien d’autre que l’expression de l’être atomisé achetant, vendant. La réalisation de l’ « être humain » en tant qu’être mercantile et en tant que démocrate qui décide librement procèdent de la même illusion. Avec cet impuissant social qu’est le consommateur-citoyen, la déshumanisation totale de l’être humain se réalise en tant que monade séparée de toute véritable humanité, en tant qu’individu sans aucune sorte de communauté humaine. La communauté de l’individu atomisé ne peut être que communauté fictive. Pour cette raison, la véritable communauté humaine ne peut surgir qu’en contre-position totale à l’individu, en tant que communauté de lutte contre l’exploitation et l’oppression, en tant qu’abolition de la démocratie.

10La communauté de l’individu atomisé atteint son expression maximale et sa réalisation dans la guerre entre fractions bourgeoises. La gloire suprême de l’individu atomisé et réunifié démocratiquement dans les communautés fictives du Capital se réalise quand la vie même est sacrifiée dans la guerre, quand on meurt pour la religion, pour la nation, pour le front populaire, pour la guerre impérialiste... En réalité, il s’agit de la guerre généralisée du Capital, parce que le sujet historique effectif qui se reproduit réellement n’est pas les individus (que la guerre consomme), ni les unités fictives (qu’elle utilise comme déguisements), mais bien le Capital s’autoreproduisant. En elle, les individus réalisent leur nature profonde de particules tuant et mourant comme des mouches soumises aux fractions patriotiques, racistes, religieuses. Elle est le niveau suprême de négation de l’être humain, le moment culminant du Capital en tant que valeur en procès assurant la destruction pour un nouveau cycle de reproduction élargie. Au plus démocratique serait l’unification des individus dans les communautés fictives, au plus total et achevée peut être la destruction de l’humanité et la réalisation des objectifs fondamentaux du Capital.

11Bien sûr, quand on arrive à cette extrême destruction généralisée des êtres humains, le Capital se cache comme sujet, ce ne serait pas lui, ni sa société qui produit cette impressionnante « barbarie » de la civilisation, mais l’ « être humain même », qui « a toujours été égoïste ». Le cercle vicieux et fermé dans l’idéologie du Capital justifie l’enfer même qu’il a créé, tout en accusant ce qu’il détruit (l’humanité). Comme si l’humanité était identifiable à la somme de ces immondes individus citoyens, qui sont en réalité le produit moderne et chaque fois plus inhumain du développement de la société, de la guerre et de la destruction. « L’égoïsme est propre à l’être humain, la guerre se trouve dans la nature humaine », répète l’esclave soumis. Ce qui en réalité est le résultat est présenté comme la cause.

12Tout atome de valeur cherche plus de valeur, c’est cela le capital. L’atomisation, l’individu libre et opposé aux autres (dans le marché, dans les élections) contient tous les principes de la valeur se valorisant et par conséquent la concurrence et la guerre impérialiste. Les mots d’ordre nationaux et populaires, les calicots de footballeurs, régionaux, nationaux... les sectes, les discours politiques, idéologiques, religieux... ne sont rien de plus que les formes régionales, temporaires dans lesquelles le capital structure à son service (celui de sa propre valorisation) les individus atomisés. Mais au-delà du temporaire, du régional, du sectaire... ce qui est invariant et constant dans la démocratie sociale c’est la production de l’individu atomisé et son organisation dans de fausses communautés, sa mobilisation dans mille intérêts opposés dans lesquelles meurent comme des mouches les esclaves salariés modernes au nom de l’un ou l’autre dieu, de la patrie, de la droite, de la gauche, de l’unité régionale ou l’autonomie localiste... jusqu’à l’une ou l’autre communauté de tel style musical, d’autogestionnistes, d’écologistes ou encore une telle équipe de football. Cela se vérifie depuis les niveaux les plus locaux jusqu’aux grandes corporations mondiales et constellations de puissances impérialistes.

13Il est certain que la forme politique de la démocratie varie beaucoup selon la région ou l’époque. Elle peut être parlementaire, bonapartiste, de droite, de gauche et jusqu’à monarchique (comme en Europe)... elle peut également fonctionner sur base de la volonté populaire (le peuple est précisément la communauté fictive des citoyens unifiées par le Capital !) ou contre elle ; elle peut se développer sur base d’un état d’exception permanent ou d’une perfection citoyenne ; elle peut être un exemple de républicanisme et envoyer dans le reste de la planète des tortionnaires et des assassins ; elle peut être populiste ou oligarchique... Mais il n’existe aucun exemple historique de démocratie qui n’inclut le terrorisme d’État interne ou externe (impérialiste) comme élément essentiel de celle-ci. Quelque soit donc la forme, l’essence sociale ne change pas dans l’absolu. Il lui est indispensable de détruire toute communauté d’intérêts et de lutte qui remette en question l’ordre social établit, le Capital. Elle n’accepte d’opposition qu’en son sein, avec ses règles, avec ses partis et ses communautés fictives : elle ne supporte pas la communauté de lutte (négation de l’individu atomisé) qui s’oppose à ses fondements, à ses fictions unificatrices. En opposition à celle-ci, elle montre toujours sa nature dictatoriale, parce que cette nature est essentielle à la démocratie ! C’est pour cette raison que dans ce corps de la démocratie, on trouve toujours la terreur d’État, qu’elle agisse de manière ouverte ou comme menace.

14Toute opposition entre démocratie et dictature, entre violence d’État et démocratie est une illusion idéologique fomentée par le Capital et l’État, promue par la dictature démocratique effective du Capital ; elle ne résiste pas à la moindre analyse historique. Cette opposition se base toujours sur le fait d’ignorer la réalité sociale de la démocratie étant donné qu’en elle, il est impossible de nier le terrorisme d’État comme fondement historique. Le formalisme politique, l’analyse exclusivement politique de la démocratie (comme si elle n’avait rien à voir avec la propriété privée et la dictature, et qu’il ne s’agissait que d’un mode de décision opposé à un autre) est la clé de la falsification, du piège tendu, opposant la dictature à la démocratie. L’identification moderne de la démocratie à une forme de décision par des élections et des majorités est, soit dit en passant, une autre falsification historique : à Athènes non plus, cela ne s’appelait pas « démocratie ».

15Dire « mais je préfère la dictature à la démocratie », c’est se faire complice de la falsification. Dans les faits cela équivaut à dire : je préfère être blanc et citoyen des États-Unis que d’être noir et torturé dans n’importe quel pays du monde par les troupes de ce même pays. C’est une « option » seulement pour celui qui se complaît dans la fausse dichotomie idéologique. Le prolétariat en tant que classe n’a, ni ne peut avoir cette option. Par contre, il est logique que le citoyen conformiste préfère voter et ignorer que cette même démocratie torture le noir à l’autre bout du monde.

Notes de « Notes sur la démocratie »

1. Nous utilisons le mot échange pour désigner un processus très large de mercantilisation historique de l’être humain qui inclut le crédit, la constitution de pôles d’accumulation d’argent (temples), d’émission de billets, le développement de centres religieux/militaires correspondant à cette évolution.

2. Marx, Grundrisse.

Encadrés de « Notes sur la démocratie »

A propos des concepts

En réalité, au sujet de n’importe quel concept central, il ne faut jamais croire ce que disent les idéologues du Capital et de l’État, ni prendre le même point de départ qu’eux. Il faut au contraire commencer par se demander comment ce concept a surgi socialement et historiquement et tout devient claire.

Il ne faut pas demander à un curé qu’il définisse la religion !

Ni à un léniniste qu’il définisse l’antifascisme !

Ni à un scientifique qu’il définisse la science !

Ce que disent les ennemis tend invariablement à cacher l’essentiel.

Utilisons ces trois « petits exemples » de concepts falsifiés pour confronter notre propre conception et clarifier ainsi ce que nous disons des concepts tels que le Capital ou la démocratie : la religion, l’antifascisme et la science.

a. Pour savoir ce qu’a été et est la religion, la bonne parole des curés ne sert à rien parce qu’ils partiront de manière invariante de dieu comme quelque chose d’existant. Tout ce que disent les curés est orienté pour que nous ne sachions pas qu’il s’agit d’une idéologie pour endormir et assurer la domination, que cela a toujours été l’« opium des peuples ». La religion surgit partout en tant que puissance historique d’exploitation et de domination. Partout elle a été et reste essentielle dans l’exploitation de classe, dans la répression et la torture des exploités. Toute présentation de la religion à partir de l’idée de dieu est une occultation en faveur de la domination de classes.

b. De même, ce que peut déclarer un léniniste à propos de l’antifascisme ne peut être utile parce qu’il partira de la légende noire du fascisme écrite par ceux qui ont gagné la guerre. Même le mot occulte la fonction réelle de l’antifascisme ! Non, l’antifascisme n’est pas né, ni n’a été créé pour affronter le fascisme (qui était alors une fraction de la gauche du socialisme), il n’a été que le prétexte ! L’antifascisme est né et s’est développé pour liquider la lutte autonome du prolétariat contre le Capital et l’État. C’est pour cette raison qu’il a tué, torturé, fait disparaître, bombardé des villes, pollué des champs, des rivières et détruit des jungles et forêts, remplit le monde de camps de concentration et travail forcé et alla jusqu’à utiliser la puissance atomique pour exterminer des êtres humains. Comme on le sait, il s’est consolidé en tant que force mondiale avec la macabre alliance entre les forces impérialistes qui se sont opposées dans la dite « seconde » guerre mondiale.

c. Enfin, nous voulons dénoncer comme mensongère la définition de la science que peut donner un scientifique. En effet, la prétention de la science d’être un ensemble de connaissances « objectives » prouvées, « non dogmatiques »... n’a aucune légitimité. Les connaissances scientifiques sont en réalité les dieux de la science, tandis que ce qui nous intéresse, c’est la fonction sociale de celle-ci. A fortiori, la conception de gauche qui l’excuse et se lamente sur le fait que « le problème est qu’elle est au service du Capital » n’a aucune légitimité. Cette conception demeure prisonnière de ce qu’« ils » disent d’eux mêmes : que la science se définirait d’abord par son objet et ensuite par sa fonction sociale. Non, la science « n’est pas seulement au service du Capital » mais est, de par sa constitution historique, une force historique du Capital. Il en va de même avec toutes les forces productives, elles ont été conçues comme partie prenante de la dictature du Capital. En effet, la science est historiquement, tout comme la religion, une idéologie et une puissance dominante, c’est une force engendrée et développée par le Capital, et ce n’est qu’en fonction de celui-ci qu’elle s’érige en tant que « connaissance », comme le curé fonde la vérité « en Dieu ». Sa fonction fondamentale dérive de la séparation historique de l’être humain par rapport à lui-même et ses moyens de vie. La clé de la science est la séparation de l’être par rapport à son propre corps, concomitant avec la séparation de la communauté humaine par rapport à la nature, séparation des êtres vivants entre eux et par rapport à leurs connaissances naturelles, directes. Le contact que l’être humain a toujours eu avec lui-même, avec le cosmos, avec la terre, avec l’énergie vitale universelle, a été approprié, réprimé et mis entre les mains de spécialistes : la religion et la science. Le monopole de la violence de la part de l’État s’impose au même rythme que la science et la religion monopolisent ses territoires et ses pouvoirs. Le corps même de l’être humain a cessé de lui appartenir dans la mesure où il a été transformé en objet de la science et, avec le temps en domaine de l’industrie pharmaceutique. Toute connaissance directe est devenue sorcellerie ou hérésie punie des pires tortures. Cette séparation a été, en même temps, consolidation de la connaissance en tant que spécialité, en tant que pouvoir séparé, étatique et, de l’autre côté, prohibition de la connaissance directement communautaire, directement humaine. La persécution des sorcières, la prohibition totale de la transmission de la connaissance ancestrale, les hôpitaux, les prisons consolidèrent la dictature du scientifique et la dictature de la médecine, de la chimie et autres spécialités (soumises depuis le début au profit du Capital). Nous insistons, ce n’est pas seulement que la science est au service du Capital sinon que, comme l’État même ou la religion, la science est une force de domination et d’exploitation depuis son origine et sa supposée « distinction » avec la religion n’a été autre chose qu’une division du travail du même type que l’infanterie, l’artillerie et la cavalerie. Justement, c’est comme force d’oppression que la science a eu et continue d’avoir ses centres de culte et de recherche, ses griffes répressives pour brûler les infidèles, ses financements ouverts et occultes, ses profits juteux et ses mercenaires à sa solde.

Ce qu’est et ce que n’est pas la démocratie

Nous avons toujours voulu exposer la démocratie comme un tout, en incluant tant le terrorisme d’État que le cirque électoral, mais nous constatons souvent que socialement, par « démocratie » on comprend « bon côté » de la chose, le « cirque » et que l’autre côté reste en dehors comme « non démocratie ». C’est comme si on alimentait les lions du cirque avec les disparus de Mexico, les enfants de Gaza et les réprimés de Haïti (par les Nations Unies), mais avant qu’ils n’arrivent devant les spectateurs. Pour lui, pour le spectateur citoyen, ce qui compte c’est le bon côté du cirque, le spectacle, c’est en cela qu’il croit, c’est cela qu’il applaudit ; il ne veut rien savoir sur comment les fauves sont alimentés.

Le plus grave c’est que cela continue a se passer « ici et maintenant », dans les discussions de tous les jours. Même quand nous participons à des discussions avec des camarades « révolutionnaires », qui se disent révolutionnaires, de la « gauche communiste », de l’anarchisme et jusqu’aux « insurrectionnalistes »... nous constatons quils opposent démocratie et dictature et qu’ils considèrent la démocratie comme synonyme d’élections libres. Ce n’est donc malheureusement pas seulement la gauche bourgeoise qui croit que la situation mondiale va s’arranger grâce à davantage de développement, davantage de démocratie, grâce à la réalisation des tâches démocratiques mais aussi ceux qui proclament « la révolution » tout en étant réduits au rôle de spectateurs, de citoyens par la société et sa gesticulation quotidienne.

Nous constatons que cette vision, celle du citoyen en général, se trouve bien plus enracinée dans le citoyen des puissances impérialistes. Bien sûr, cette vision n’est pas celle de celui qui est poursuivi et torturé dans n’importe quel endroit du monde.La clé de la domination se trouve précisément dans ce mensonge sur ce qu’est la démocratie. Le citoyen israélien a une vision nécessairement différente de la démocratie que le prolétaire de Gaza qui est bombardé et qui voit ses frères crever et ses maisons s’effondrer. Il voit la réalité de la démocratie comme n’est capable ni même de l’imaginer le citoyen israélien, pas plus que le citoyen argentin, anglais, thaïlandais ou bulgare. Le citoyen français qui votait pour Mitterrand ou pour la droite, ne pouvait avoir la même vision que les torturés en Algérie ou les torturés du Cône Sud (grâce aux cours de torture dispensés par les généraux français du gouvernement de Mitterrand lui-même !) en Argentine ou au Chili. La grande majorité de citoyens blancs étasuniens croient que leur démocratie c’est le cirque entre les républicains et les démocrates, ils croient qu’elle n’a rien à voir avec le Napalm sur le Vietnam, le Laos ou le Cambodge et l’opération Condor, organisée par leur gouvernement républicain et démocrate. Mais il est pire encore que quelqu’un qui se dit révolutionnaire fasse la concession de parler de démocratie en tant que synonyme de processus électoral aux USA sans inclure les bombes atomiques contre les villes d’Hiroshima et de Nagasaki, qu’il prononce ce mot comme synonyme de quelque chose de positif voire de pacifique en oubliant d’y inclure l’armée, les prisons, la torture qui est la caractéristique centrale de cette État. En réalité, plus la démocratie a été exemplaire (comme celle des États-Unis), plus on peut constater de guerres, de militarisme, de bombes sur la population civile dans son histoire. Et c’est aussi sans aucun doute cette démocratie qui a organisé le plus d’escadrons de la mort et de disparitions de personnes sur l’ensemble de la planète.

Le pire de tout est que l’on continue à penser qu’Obama est plus démocratique parce que « il a été élu librement » et pas parce qu’il dirige la puissance de destruction humaine la plus gigantesque de l’histoire de l’humanité. Dans cette opposition, nous pensons que celui qui a le plus de conscience de ce qu’est réellement la démocratie, c’est l’enfant de Gaza, le noir bastonné dans les prisons des États unis ou en Haïti, le torturé et disparu de Mexico, de Colombie, d’Argentine... et que la vision du parfait citoyen, partout, est une vision partielle et illusoire, même si « la liberté de choisir » est une réalité au sein de cette illusion. La clé du citoyen, agenouillé et soumis face aux messes électorales est précisément cette illusion sur ce qu’est la démocratie, revendiquée avec la tant rabâchée « liberté de choisir ».

En tout cas, notre vision de la démocratie, que nous venons de réaffirmer dans ces notes, est celle que ceux qui luttent ont forgé contre sa dictature et non celle que portent les citoyens, les bons lecteurs et autres « animaux domestiques », comme le disait Rodolfo Gonzalez Pacheco dans ses célèbres « Carteles ».

En manque de démocratie !?

Non, catégoriquement non !

Nous en avons toujours eu trop, c’est pour cela que nous en sommes là !

Voilà la réponse élémentaire du prolétariat partout !

Que ce soit avec la démocratie ou avec le capitalisme, on nous propose chaque fois plus de la même chose. En effet, nos ennemis rejettent toujours la faute de nos maux sur le manque de démocratie. Quand un tel diagnostic est effectué, nous savons toujours ce qui s’en suit : invasion militaire, beaucoup de flicage et de terreur d’Etat… pour nous imposer la tant vantée démocratie.

C’est comme quand les Yankees et les Français envahirent Haïti pour leur imposer la démocratie ! Et ensuite, tous les autres pays ont suivi, les grands, les petits, au nom des Nations Unies, qui leur ont amené au passage, en plus de la démocratie, le choléra… des centaines de milliers de mort… Et ils continuent à tuer des gens dans les rues pour leur offrir toujours plus de démocratie.

Combien de fois nous a-t-on dit que la Bolivie manquait de démocratie et ils ont fait coup d’Etat sur coup d’Etat, élections et cirques… et on continue à dire que la Bolivie souffre d’un manque de démocratie !

C’est exactement pareil avec le capitalisme. Du 16ème au 19ème siècle déjà, le tsarisme avait développé le Capital en Russie et durant toute cette période, les luttes du prolétariat contre le capitalisme et l’Etat étaient réputées dans le monde entier. Durant le dernier quart du 19ème siècle, le drapeau du socialisme révolutionnaire s’est imposé, comme dans d’autres pays du monde (Mexique, Argentine, France, Espagne…) en tant que projet antagonique au capitalisme et à l’Etat. C’est à ce moment-là que s’est développée, contre le mouvement révolutionnaire, la théorie politique social-démocrate, qui accusait de tous les maux non pas le capitalisme et la démocratie mais bien le manque de capitalisme et le manque de démocratie, en soutenant qu’il fallait réaliser les « tâches démocratiques bourgeoises ». Telle a été le rôle de la social-démocratie dans le monde entier : détourner la lutte du prolétariat contre le Capital en une lutte pour le Capital et la démocratie qui étaient, disaient-ils, trop peu développés. En Russie, cela a été le rôle des minorités et des majorités de la social-démocratie que de détourner la rage prolétarienne, dirigée contre l’exploitation et l’oppression, vers la défense du Capital et ses tâches démocratiques. Le léninisme s’est acquitté de ce rôle : progrès considérable du Capital, beaucoup de travail, beaucoup d’Etat, beaucoup de développement des forces productives. Voilà en quoi consistent les fameuses tâches démocratiques bourgeoises qui incluaient, évidemment, les millions d’être humains enfermés dans les camps de concentration et de travail forcé.

Non, nous ne manquons pas de capitalisme !

Nous ne manquons pas non plus de démocratie !

La bourgeoisie a déjà effectuées les tâches

démocratiques dont elle prétend perpétuellement devoir s’acquitter et toutes ont été invariablement

dirigées contre notre classe !

Nous en avons assez !

Nous ne supportons pas davantage de Capital,

nous ne supportons pas davantage de démocratie, nous ne supportons pas davantage de progrès,

ni de progressisme !

A bas le Capital et toute la démocratie !

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